LES GRANDES MANOEUVRES

L'exercice ? Écrire un texte sur la base d'une image. 

- Je pense qu’on n’est pas mal là.

Gunter aime que son camping-car soit bien garé. Ça le satisfait. De ces satisfactions provoquées par le travail pas forcément compliqué mais bien fait. Et c’est vrai qu’il est bien positionné son Chausson 7020 Intégral - grand salon carré à l’avant et chambre arrière modulable. Ni trop près des autres estivants pour garder une part d’intimité, ni trop loin pour éviter d’être isolés. Il est à bonne distance. Et la bonne distance ne se mesure pas, elle se ressent.

- Oui on est bien, répond Matilda.

Elle regarde son mari, qui la regarde en retour. Le hochement lent de sa tête peu expressive de solide bavaroise finit de convaincre Gunter. Il coupe le moteur. Le silence. Au loin quelques rires d’enfants, assourdis par le soleil et le sable. Encore plus loin le bruit des vagues qui viennent caresser la plage. Et le son vaste et imperceptible de la mer, doux, puissant, éternel.

- Je descends les cales et j’accroche l’auvent.

- J’installe le salon.

Même si à la longue les tâches du couple sont clairement définies, Matilda et Gunter se plaisent à les verbaliser à chaque installation sur un nouvel emplacement, sur une nouvelle plage, sur un nouveau parking. Ils sont comme ça Matilda et Gunter, ils sont bien organisés. Les gestes sont précis, les actions efficaces. En moins de trente minutes, la totalité des fonctionnalités offertes par ce modèle haut-de-gamme de la marque de camping-car française est déployée. Jusqu’aux quatre chaises grand confort du salon extérieur parfaitement alignées, en duo, de part et d’autre de la table recouverte d’une nappe dont les motifs bariolés terminent de composer une scène parfaitement conforme aux objectifs du couple.

Matilda et Gunter s’installent du même côté de la table, face aux deux autres chaises qui savent très bien qu’elles resteront inoccupées pendant toute la durée du séjour, elles n’ont pas besoin qu’on leur fasse un dessin les chaises vides. Et face la mer, mais à bonne distance. Ni trop près pour réduire le risque que les embruns ne viennent dégrader la peinture du camping-car, ni trop loin pour s’éviter des marches trop longues jusqu’à l’eau. À bonne distance quoi.

- Je pense qu’on n’est pas mal là. 

À lire sur la même image,Horizon zéro de Thibaux.

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